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                             VI

ne connaissaient que son anguleux pavé, bien loin d'avoir
étudié nos mœurs et le fond de notre vie habituelle,
Ses hommes-là, par gloriole de Parisiens ou par outre-
cuidance de faux marquis , prononçaient en dernière
analyse sur la traditionnelle malpropreté de tout Lyon ,
sur les gros pieds des Lyonnaises , sur notre esprit bour-
geois et notre béotisme avéré. Ici donc, suivant eux, les
sciences ne sauraient avoir de partisans, les beaux-arts
ne comptent point d'adorateurs, les lettres point de re-
présentants , et les calculs absorbants de l'industrie
clouent au sol toute faculté expansive. Voilà ce que di-
sent et répètent à satiété les plus vulgaires même d'entre
les commis-voyageurs.
    Or, des esprits d'un ordre un peu plus relevé ont sou-
vent couvert de leur sanction ces respectables arrêts, et
nous méritons d'être montrés au doigt comme de vils et
inertes crétins que nous sommes. Pourtant, il faudrait
 que la noble cité relevât la tête , et voulût faire face aux.
calomnies, car, eniîn , elle s'appuie sur un glorieux passé,
 et je ne sache pas que le ciel lui doive refuser sa portion
 d'avenir.
    Les cités sont pareilles aux champs que féconde la main
 du laboureur; elles o n t , dès leur origine, un germe pro-
 ductif qui ne s'épuise pas si vite, bien qu'il compte ses
 mauvais jours et ses années de stérilité. Laissez faire; la
 plante qui végète, le grain qui sommeille se produira au
 temps venu, et vous reconnaîtrez la généreuse nature d'un
 sol qui n'est pas ingrat.
    Nous savons que notre illustration littéraire est con-
 temporaine des beaux âges de Rome ; c'est Rome elle-
 même qui a vanté nos luttes oratoires et nos librairies,