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338 ROUMANILLE ET LE FELIBRIGE « Remy appartenant au même canton et comme nos « familles étaient depuis longtemps liées intimement, nous « fûmes, de notre côté, bientôt fort liés aussi, le jeune « maître d'étude et moi. « Roumanille déjà connu en Provence, s'occupait, à « cette époque, de réunir ses poésies (publiées depuis 1835, « par l'Echo du Rhône, journal de Tarascon), en un premier « volume, intitulé Les Pâquerettes. A peine m'eût-il montré « ces douces fleurs de printemps, que j'en ressentis une « forte impression et que je m'écriai : « Voici l'aurore « que mon âme attendait. Voici la vraie lumière. » J'avais « sans doute à cette époque lu un peu de provençal, « mais j'étais troublé de penser que notre langue ne servait « plus qu'à débiter des plaisanteries, car je ne savais « rien encore du travail de Jasmin. Roumanille était le « premier qui, dans une forme fraîche et suave, chantait « dignement en provençal, sur les bords du Rhône, tous « les purs et beaux sentiments du cœur. « Tel fut le début de notre liaison. Cette amitié « se forma sous une si heureuse étoile, que trente « ans durant, nous avons marché dans la vie sans le plus « léger nuage de mésintelligence au ciel de notre affection. « Tous deux brûlés du désir de redonner à notre langue « maternelle un peu de son ancien éclat, nous étudiâmes « ensemble les mots des vieux poètes provençaux, et « nous nous proposâmes de restaurer notre langage d'une « façon conforme à son caractère et à sa tradition. Cette « restauration s'est en vérité accomplie avec l'aide de nos « frères les Félibres (1). » (1) N'ayant pu réussir à me procurer la première édition des Iles d'or depuis longtemps épuisée, j'ai dû traduire de l'anglais ces lignes et