page suivante »
260 LA POPULATION PRIMITIVE DE LUGDUNUM A défaut des historiens, les renseignements fournis par la tradition religieuse ont une grande importance. Nous trou- vons dans les Bollandistes (15), à côté de récits qui con- finent à la légende, des informations précieuses recueillies dans des manuscrits aujourd'hui perdus. Dans un tableau imagé, ils nous montrent le tyran cruel faisant comparaître devant son tribunal la population chré- tienne tout entière, conduite par son évêque saint Irénée. Sur leur refus de sacrifier à Jupiter, ils sont tous exterminés par les soldats. Très certainement, il y a confusion entre les deux événements, car jamais la persécution chrétienne n'a revêtu cette forme d'exécution en masse dont on nous parle. Grégoire de Tours, qui vivait presque deux siècles plus tard, paraît avoir aussi commis le même anachronisme (16). Le carnage fut si grand, dit-il, que des torrents de sang inondaient les places : Ut per pîateasfluminacurrerent de sanguine ! La tradition nous dit aussi qu'en cette occasion* 19,000 chrétiens furent massacrés, qu'on épargna les femmes et les petits enfants, que le sang coulait jusqu'à la rivière. En présence d'un tel nombre de victimes, on est plus encore porté à croire que l'ancien récit a réuni en un seul les deux sanglants épisodes, d'autant plus qu'à l'époque de Sévère, les chrétiens étaient fort nombreux à Lyon, et quoique Tertullien nous dise formellement qu'ils ne prirent (15) Boll. Acta Sanctorum. Venise et Anvers, 1734, in-folio. Voir au 28 juin, p. 339, 2= colonne, tout l'article consacré à saint Irénée. (16) Grégoire de Tours. Histoire ecclésiastique des Francs, livre I« r , ch. XXVII (trad. fr.)