page suivante »
M. DÉSIRÉ GIRARDON 189 été rien moins que la création même de l'enseignement technique dans notre ville. En dehors de tout appui officiel, il a, malgré son indépen- dance, — grâce peut-être à cette indépendance, — fondé ou organisé trois institutions d'intérêt public. Voilà son œuvre visible. Mais il est une autre œuvre plus considérable et plus personnelle encore : quarante années ininterrompues de professorat ! Qu'on évalue quelles moissons ont dû lever de ces quarantes années de bonnes semailles. Qu'on songe à tout ce qu'a pu avoir de bienfaisant un si long et si libéral apostolat ! Qu'on songe à la somme d'idées saines qu'il a jetées dans le monde des travailleurs, à la somme d'efforts moraux qu'il a sollicités, à tout ce qu'il a ajouté ainsi de richesses au patrimoine commun de la dignité humaine ! Il n'a pas enseigné des vérités ou des faits : il a éduqué des âmes, parce qu'il enseignait avec son âme. Il aimait les ouvriers, il les aimait et les estimait. Il avait confiance en eux ; il savait, lui qui les avait vus de près, que la grande masse est pleine de vertus simples et fortes. C'est une terre saine et fertile, où lèvera bien la moisson pourvu qu'on ne l'étouffé pas. Laissez-la croître dans l'air et la lumière, c'est-à -dire donnez l'instruction et respectez la liberté. Ce n'est pas en les tenant en tutelle qu'on élève et qu'on fortifie les faibles. Il faut les instruire sans doute, mais il faut aussi les habituer à vouloir, les accoutumer à user de leur liberté, développer chez eux le souci de la dignité et le sentiment de la responsabilité. Montrez-leur, ouvrez-leur la route, mais ne les tenez pas par la main. C'est avec ces principes de libéralisme éclairé, avec cette élévation de vues, ce respect de l'indépendance et de la