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J . - J . ROUSSEAU ET MADEMOISELLE SERRE 63
des visées peu dignes d'un galant homme et surtout d'un
philosophe, qu'il cherche, l'année suivante — pendant un
nouveau séjour à Lyon, au cours de l'automne de 1741 —
à faire agréer ses sentiments par la jeune fille. Du reste,
rien ne prouve qu'elle lui accorda cette « confiance » et
qu'il fit ce « sacrifice à la vertu » dont il se targue dans les
Confessions.
M1Ie Serre, ainsi que les faits le montreront, était pour-
tant fille à subir tous les entraînements d'une passion par-
tagée. Elle était recherchée par un jeune commerçant,
Victor Genève, dont la famille, d'origine suisse, occupait
à Lyon une position importante, et bien supérieure Ã
celle de la famille Serre. Un Jean-François Genève, oncle
ou cousin de Victor, né en 1706, mort en 1776, a été
appelé aux fonctions de premier syndic du commerce et
aux fonctions d'échevin (1752-1753) ; il fit aussi partie de
l'Académie de Lyon. Anobli par l'échevinage, il avait pris
pour armoiries celles de la ville de Genève, sa patrie d'origine.
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Suzanne Serre ne fut pas insensible aux attentions de
Victor Genève, et il est à croire que, dès le début, la préfé-
rence de la jeune fille se prononça d'une façon manifeste.
Une lettre de la main de Rousseau (1) ne laisse aucun doute
à cet égard :
« Vous m'avez, lui écrit-il, traité avec une dureté
incroyable, et s'il vous est arrivé d'avoir pour moi quelque
espèce de complaisance, vous me l'avez ensuite fait acheter
(1) Saint-Marc Girardin:. Jean-Jacques Rousseau, sa vie et ses ouvrages.