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LAURENT MEILLET DE MONTESSUY 389 et graduellement à la mesconnaissance d'eux-mêmes et par infaillible conséquence ils sont devenus truands, paresseux, négligents, gourmants, dissolus, cajolleurs et vrais instru- ments de faitnéantise, servans de mauvais exemples à leurs enfans et successeurs qui par succession de temps imitant leurs pères opéreront encore pirement et voyla des moyens préparatoires et disposés de longue main pour la famine si Dieu miraculeusement ne nous en préserve, ou si le magis- trat n'y pourvoit et remédie de bonne heure. En une seule chose ceste truandaille de grangers monstrent leur diligence et habilité c'est que la taverne est bien éloignée s'ils ne s'y transportent pour la visiter bien souvent et vendre à un surbornateur de cabaretier ce qu'ils dérobent journellement à leurs maistres soit sur les semences des bleds, soit dans Taire quand l'on les bat, ou autrement (37). » Si l'on oppose ces lignes au célèbre passage de la Bruyère sur les paysans, si l'on se souvient en même temps de quelques pages navrantes et réalistes de nos écrivains modernes sur le même sujet, on en vient à conclure que, fatalement, les misérables font plus eux-mêmes pour causer ou augmenter leur propre misère, que ne font les conditions sociales ou les événements malheureux. C'est donc à Montessuy que Meillet pour « combattre l'ennuy et la solitude de la vie champestre », termina sa traduction française des discours de Scipion Ammirato. En 1618 (38), parurent les : DISCOURS POLITIQUES ET MILITAIRES, sur Corneille Tacite, excellent historien et grand (37) Ed. 1618, p. 393 ; éd. 1628, p. 370. (38) Un an plus tard, en 1619, Jean Baudoin publiait à Paris les Œuvres de C. Tacitus, de nouveau traduites et illustrées d'annotations, avec des discours politiques tirés de l'italien de Scipion Amirato (in-4 0 ).