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                                  LE

     THÉÂTRE A LYON
              PENDANT LE XVIII' SIÈCLE
                               (Suite)



   Les comédiens formaient,, sous l'ancien régime, une
classe à part et occupaient dans la société une situation
tout exceptionnelle. Avaient-ils du talent, de l'esprit, de la
beauté, de la vogue surtout : on les portait aux nues, toutes
les portes s'ouvraient pour eux, tandis qu'elles restaient
closes pour les gens du tiers. Dans cette aristocratie, si fière
de ses quartiers de noblesse et souvent si hautaine envers la
bourgeoisie, peu importait à la femme la naissance et le
rang d'un homme ; que ce fût un acteur, qu'il eût encore
aux joues le rouge du théâtre : s'il était couru, les plus
grandes dames en faisaient leur héros. L'impertinent Mole
donnait-il une représentation à son bénéfice ? les femmes
faisaient souscrire tout le monde, même l'archevêque de
Lyon, Mgr de Montazet, et l'acteur employait le produit
de la souscription, 24,000 livres, à acheter à sa maîtresse
une parure de diamants. La chose fut mise en chanson :

        « Mole, plus brillant que jamais,
          Donne des soupers à grands frais,
          Prend des carrosses de remise,
          Entretient filles et valets ;
          Les femmes vuident les goussets
          Même des Princes de l'Eglise.
                    Pour servir
                    Son plaisir,
                    La sottise !
          Elles se mettraient en chemise (1). »

  (1) Mém. secr. de Bachaumont, 1e1' janv., 6 fév. et 2 mars 1767.