page suivante »
38 UNE VISITE PASTORALE bre de prêtres habitués. Or, il n'était pas toujours très-facile de maintenir, entre tout ce monde, une harmonie parfaite. Les petits défauts de caractère, les jalousies, les compéti- tions et autres sentiments de bas étage se faisaient jour de façons très-diverses, en sorte qu'un malaise véritable ré- sultait parfois de cet état de choses. Quand Mgr de Marquemont visita Saint-Bonnet en 1614, outre que certains sociétaires ne se gênaient point assez de « hanter les tavernes et cabarets », il y avait, dans la bergerie, sinon un loup ravisseur, du moins un fort mau- vais voisin : Bonnet Farez était son nom. C'était une na- ture inquiète et mal équilibrée ; un de ces esprits brouillons qui se portent facilement aux extrêmes et qui non contents de semer le trouble autour d'eux, semblent avoir à tout ja- mais divorcé avec la prudence. Il circulait à son endroit plus d'une histoire désagréable, et des plaintes énergiques venaient d'être déposées entre les mains de l'archevêque. Celui-ci s'en émut. Or, voilà qu'au sortir de la chapelle de Notre-Dame, il aperçut tout à point à quelques pas de lui le personnage. L'appelant alors du geste : « Vous êtes, « lui dit-il, un jeune leuronqui ne voulez reconnaistre vos « supérieurs et mettez toute cette ville en trouble et divi- « sion; car, sans vous, je ne trouverais rien d'imparfait en « ma visitte ; si vous ne vivez plus paisiblement et n'estes « plus humble et modeste, je vous mettrai en un lieu que « l'on ne vous verra plus. Partant, soyez plus saige, si « vous voulez. Et vous, Monsieur le curé, supportez plus « patientent ses deffaux, et accoulez-vous tous deux en si- « gne de bonne amitié. Le dict Farez s'estant aussitost ap- « proche pour ce faire, je dis : Monseigneur, vous avez « tout pouvoir sur moi; je ferai ce qu'il vous plaira : je dé- « sirerais bien qu'il pleut à vostre révérance de faire dire « au dict Farez s'il est vrai que je l'aie bastu dans l'esglise