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LE TESTAMENT D'UN LYONNAIS 323 péenne, a commencé et le droit de tester, et l'indépendance de l'homme dans la cité. Dans le monde moderne, c'est après une longue lutte pour la liberté civile que le citoyen français a pu conquérir la faculté de transmettre ses biens à sa volonté, sous les quelques réserves édictées par le Code. Si la féodalité a laissé dans l'âme de la grande masse des Français tant de haines amassées, c'est pour beaucoup à cause de ses prétentions sur les actes et les engagements de la vie civile. Ce que, par un barbarisme, on pourrait appe- ler la personnalisation de la propriété, et la libre transmis- sion des biens après la mort sont deux termes corrélatifs. Ce sont deux sûrs étalons du développement politique et intellectuel d'un peuple. Mais le testament réfléchit autre chose encore qu'une société. Il réfléchit une personne. Il décèle la nature de son esprit, son plus ou moins de prévoyance et de juge- ment ; il nous livre ses affections, ses pensées intimes, ses dernières espérances et ses dernières terreurs. Par là il touche le moraliste autant que par d'autres côtés le légiste et l'historien. A ces divers titres, on a pensé qu'il y aurait quelque in- térêt à faire connaître ici le testament d'un membre d'une ancienne famille lyonnaise qui eut de la notoriété aux xvie et xvne siècles ( i ) . I François de Mornieu, seigneur de Grammont, mort sans postérité, dont nous avons à parler, était fils de Melchior, (t) Je dois la communication de cette pièce et de toutes celles qui s'y rattachent à l'obligeance de M. J.-B. Chaize.