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BIBLIOGRAPHIE 299 ventail leur est cher, puisque c'est une manière de confi- dent. Et c'est aussi un prétexte pour leur adresser de beaux vers, témoins ceux de M. Zenon Fière. Vingt-huit sonnets à se partager entre elles 1 c'est cour- tois, c'est chevaleresque, c'est français, c'est une corbeille tressée avec art, ou bien, un vase de Sèvres, dans lequel chacune trouve sa fleur et ne peut s'y méprendre, puisque elle porte son nom. Il y en a bien deux ou trois qui n'ont point d'adresse... mais aussi, songez donc ! si l'on allait être indiscret, lorsqu'il s'agit de certaines petites traîtrises ducceur!... c'est bien assez que la mécréante puisse lire son châtiment écrit dans la langue magique appelée « la langue des dieux. » Car le poète se venge avec harmonie et se venge bien! M. Zenon Fière avait déjà publié un autre volume de sonnets : Après la moisson. Voici que le successeur de ce charmant recueil est digne de son aîné par le talent, la verve, l'esprit et la grâce. Je l'ouvre au morceau suivant, et je vais le citer aux re- gards amis qui me lisent : DOUBLE INSPIRATION Peintre, en vain j'essayai mes pinceaux impuissants : L'idéal avait fui. Poète à court d'idée, En vain je ciselai la strophe demandée : Les rhythmes résistaient à mes efforts pressants. Dans cet âpre désert de l'esprit et des sens, Ainsi que Polymnie à son marbre accoudée, Je vous vis jusqu'à moi, jeune museattardée, Fixer de vos yeux noirs les feux éblouissants. Au même instant, le ciel s'entrouvit sur ma tête Et je pus comparer en mon ravissement Le bleu de votre écharpe au bleu du firmament.