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                           UN INCUNABLE                             121

peut-être, que Jean Mercure a dû vivre sous le règne de
Louis XI, parce que ce prince superstitieux, d'une religion
peu éclairée, tremblant toujours devant la mort et affublé de
toutes sortes de médailles de piété rapportées de ses nom-
breux pèlerinages pour conjurer cette mort que ses nom-
breuxméfaits lui faisaient peut-être redouter avec raison ( i )
aimait à s'entretenir avec des imposteurs qui se donnaient
pour avoir des vertus surnaturelles. Mais comme le remar-
que très-bien le P. de Colonia, la cour de Louis XII ne
brillait pas non plus par un esprit très-éclairé « Jean Mercure
se piquait d'avoir le don de prophétie, il n'en fallait donc
pas tant pour exciter l'admiration d'une cour telle qu'était
encore celle de ce prince. » Louis XII a donc bien pu ap-
peler près de lui Jean Mercure, pendant son premier séjour
à Lyon, — être fasciné par son attitude et son [langage, et
n'est-il pas possible d'admettre, non plus, que les docteurs
chargés de l'examen de Jean Mercure, pour se faire bien
venir du roi, aient déclaré, par courtisannerie que « sa
science était plus que surhumaine. » Je suis donc porté à
croire que le livre de cet illuminé aura été imprimé, pour
la première fois, seulement en 1501, alors que Jean Mer-
cure était regardé comme un prodige par la cour et par la
ville et qu'il pouvait se qualifier de magnifiais Dominus,
comme il le fait sur le titre de son oeuvre et comme son
imprimeur Claude Davost s'y est prêté.
  Ce singulier livre a eu l'honneur d'une réimpression (2),
mais à Anvers, en 1502; le fait est certain, puisqu'il est


  (1) Louis XI redoutait tellement la mort, qu'il ordonna à ses officiers
quand ils le verraient désespéré, de l'avertir, mais sans prononcer le
mot de mort; il suffira, dit-il, de me dire : « Parlez ieu. a (Mémoires
de Comines.)
  (2) Voir l'appendice du catalogue de M. Desbarreaux-Bernard,
page 250.