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54 PIERRE ET JEANNETTE septembre qui sont les plus calmes et les plus délicieux de l'année, je me promenais avec mon excellent ami A***, que j'avais invité à passer quelques semaines avec moi; nous nous arrêtâmes devant une petite maison de paysan un peu écartée du reste du village et que mon ami remarqua par sa construction plus gracieuse que celle des autres habitations, par son jardin mieux tenu, des plantations d'arbres mieux ordonnées, une cour propre et sablée, enfin par une appa- rence générale de soin et de confortable que n'offraient pas les demeures du voisinage. Ce que vous voyez, luidis-je, n'a pas toujours été ainsi. Le séjour qui frappe agréablement votre vue en ce moment a été le plus misérable du pays : c'est un exemple de la transformation que peuvent opérer la persévérance, le tra- vail, les bons sentiments, la bonne conduite. Mais asseyez- vous sur ce tertre, d'où la vue plonge au loin sur nos vertes vallées; nous nous reposerons, en jouissant de ce bel ho- rizon, et je vous raconterai l'histoire de ce cottage, elle pourra vous intéresser. Pierre, propriétaire de cette petite maison, est le fils d'un de mes vieux fermiers; je l'avais remarqué dès son en- fance pour ses bons instincts, pour son amour de la vérité et du devoir. J'étais venu de Paris, sans ma famille, visiter mon ermitage, où m'avait appelé une affaire urgente. Ma femme m'écrivit qu'elle voudrait avoir une bonne d'enfant puisée dans les honnêtes éléments de notre campagne, es- pérant avoir un service plus sûr, plus dévoué, que celui des domestiques si perverses dont Paris abonde. Je recherche dans tout le village, et je ne rencontre pas de jeune fille qui satisfasse aux conditions imposées par ma prudente compagne. J'allais répondre que je n'avais rien trouvé, lorsque mon fermier Joly me dit : « Vous devriez