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PIERRE ET JEANNETTE ou L'ÉCOLE DES PAYSANS I J'étais venu passer quelque temps dans mes chères mon- tagnes du Charollais, non loin de cette vallée de Saint- Point où se plaisait notre Lamartine. C'est là que, dans le hameau de Beauregard, s'est écoulée mon enfance, sous les yeux et sous l'instruction vigilante du meilleur des pères et de la plus tendre mère. J'y reviens chaque année avec bonheur; je m'y réfugie délicieusement dans le nid paternel, je m'enfonce avec un indicible plaisir dans ces bois que mes parents et moi avons plantés ; je parcours les prés dont la douce verdure encadre agréable- ment mon antique demeure, et je visite, en ami passionné de la campagne, les cultures de blé, de colza, de pommes de terre, de trèfle, de maïs, de sarrasin, de chanvre, qui sont la base des travaux de ce pays ; je contemple enfin avec un certain orgueil mes grands châtaigniers, mes vieux et utiles noyers, mes pins, mes mélèzes, mes sapins, dont la verdure un peu sombre s'accorde bien avec la teinte natu- rellement mélancolique de mon âme. Je préfère, je l'avoue, tout cet ensemble de végétation variée aux vignes si renommées, mais d'un aspect mono- tone, qui couvrent les coteaux des riches cantons voisins. .Par une de ces douces matinées des premiers jours de