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UN MARIAGE SOUS LES TK0P1QULS. 337 vous épouvanter ! on se sert de ces paroles pour terrifier les cœurs simples comme le vôtre. Allons, voyons! prenez courage et suivez-nous; soyez sûre que nous saurons vous préserver de toute atteinte coupable! — Non, non, senor! reprit la nourrice. Vous êtes du dehors, et vous ne connaissez pas la Nina, ni sa mère ! moi je vous dis que, si je ne renonce pas au voyage, je suis morte d'ici à quinze jours. Tout le monde tremble ici devant M. Fleming ; demandez un fpeu comment a péri son père ! Et rien ne put ébranler sa détermination, ni diminuer l'effroi qui se peignait sur son visage. Il fallut donc chercher ailleurs, redoubler de précau- tions, s'entourer d'un impénétrable mystère. Que d'an- goisses traversaient l'âme de la pauvre Wilhelmine au milieu de tous ces préparatifs qu'une indiscrétion pouvait révéler, de toutes ces espérances suspendues à un cheveu! D'un moment à l'autre Rodolphe allait reparaître. Il devait proposer à sa femme de le suivre et, en cas de refus, s'emparer de son enfant et laisser Herminia à Chirimayo. Dans les deux hypothèses, tout devait être prêt pour le départ, et les jours fuyaient sans qu'on eût ni nourtice, ni chevaux. Enfin l'on découvrit l'un et l'autre, les arrange- ments furent pris, tout fut disposé, et Rodolphe était atten- du avec anxiété, quand M. de Czernyitomba tout à coup gravement malade. Il était au lit dans un état de souf- france inexprimable lorsque son fils arriva du Tacuman. La figure de Rodolphe était grave et le voyage n'avait point apporté à sa santé l'amélioration que ses parents avaient espérés. Il salua sa femme avec une dignité froide, em- brassa son enfant, puis courut se jeter au pied du lit de son père, qui se souleva douloureusement pour le recevoir. On pressentait un grand malheur; un orage violent 22