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2V4 UN MARIAGE SOUS LES TROPIQUES. étalag-e de franchise. En me faisant sauvage et eu par- lant à tort et à travers, je conquiers non-seulement la possibilité de leur dire de dures vérités, mais encore de- cacher tout ce que je veux qu'ils ignorent. Ces Euro- péennes sont des poupées qui se bichonnent pour le plai- sir de leur miroir, des avares qui regardent à un medio, des hypocrites qui ne valent pas mieux que nous, mais qui dissimulent tout sous des dehors convenus pour sau- ver, disent-elles, les apparences sans qu'au fond personne s'y trompe. La civilisation, dont mon père m'a tant re- battu les oreilles, n'est que la science de la fausseté et, hors delà , une sottise pure parée de clinquant pour éblouir les imbéciles. Je serais bien avancée quand je m'impose- rais la gêne d'une foule de puérilités qui me feraient rire s'il s'agissait d'une autre que moi ' Non, non : on m'ap- pelle la sauvage : Eh bien ! je resterai la sauvag'e, et si je peux saumgiser Rodolphe, malgré sa mère, je n'y manquerai pas ! « Au fait, c'est une idée qui me plaît. La comtesse est choquée, — c'est clair — et chacune de mes impertinen- ces laisse sur sa figure une traînée douloureuse qui m'a- muse infiniment. Mais ce n'est pas assez, et j'élève autel contre autel; après tout, je suis la femme de Rodol- phe, et s'il doit obéir à quelqu'un c'est à moi. Nous ver- rons bien ! « Adieu, chère Anita, envoie-moi par le premier exprès tout ce que tu pourras de sucreries : on meurt de faim ici avec cette atroce cuisine européenne, et tes douceurs seront les bien-venues ! » On voit par la lettre qui précède que le terrain sur lequel le comte voulait faire germer la semence de la civi- lisation était on ne peut plus mal préparé. Sans arriver à une révolte ouverte, Herminia neutralisait par un sar-