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              UN MAIUAGE SOUS LES TROPIQUES.            333

ment. Herminia a des passions indomptables et, chez elle,
l'orgueil occupe une telle place que tout amendement est
impossible. Vois avec quelle ténacité elle persiste dans
une pensée préconçue, avec quelle astuce elle en prépare
le succès, quelle puissance d'inertie et quelle audace de
moyens elle emploie tour à tour ! Ne pouvant vaincre par
de mauvais procédés directs la prévoyance qui nous fait
rester auprès d'elle, elle cherche à nous dompter par des
insultes détournées. Elle loge sous notre toit parce que
c'est le domicile conjugal; mais elle se fait apporter, de
chez sa mère, jusqu'à un bouillon, jusqu'à une bougie,
afin que dans la ville on dise :
   — Mon Dieu! que cette jeune femme est malheureuse !
Les parents de son mari sont des tyrans qui lui refusent
jusqu'à un verre d'eau !
   Je t'assure que la patience m'échappe et que je ne res-
pirerai à l'aise que lorsque nous aurons quitté ces furies !
   — Tu as raison, mon bon Léonard, répondit la comtesse
avec douceur; tu as cent fois raison. Chaque jour cette
femme me perce le cœur par mille coups d'épingle dont
elle ne se donne plus la peine de cacher le motif. Le
sang empourpre mon front et je sens une indignation
sourde me dévorer la poitrine. Si je supporte tant d'ou-
trages, si j'apaise constamment la tempête prête à écla-
ter, si je feins de ne pas comprendre les paroles veni-
meuses, les regards haineux, c'est qu'après le bonheur à
jamais impossible par la femme, il reste à Rodolphe une
espérance par son enfant ! c'est qu'il est de notre devoir
de ne pas abandonner cette créature innocente à l'éduca-
tion immonde qu'elle recevrait de sa mère. Ah ! tu dis
qu'Herminia ruse avec nous ! Pas tant que tu crois, car,
dans nos entretiens journaliers, elle ne manque jamais
d'exprimer le désir qui la domine tout entière de rester