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250 UN MARIAGE SOUS LES TROPIQUES. tesse, qui me croit évanouie ! C'est charmant, je te jure, et si ce n'est que je dois accoucher un jour et qu'alors je dois redevenir bonne! cette comédie me ferait vrai- ment prendre le mal en patience. « Du reste,je vais être débarrassée d'un des pantins que je fais danser pour mes petits plaisirs. Rodolphe s'en va en mission au Tacuman et ne reviendra probablement que pour entendre miauler sa progéniture. Je ne sais ce que pense le conciliabule; mais ma volonté bien formelle est de ne pas rester à Salta. D e g r é ou de force il faudra qu'on me ramène à Chirimayo où je me sens bien plus ap- puyée qu'ici, car ma mère oubliera ses rancunes pour faire cause commune avec moi. Elle déteste les Czernyi et n'a consenti au mariage que par contrainte. Quant à mon père, c'est un vieux lâche qui avait do trop bonnes j a m - bes sur le champ de bataille pour ne pas fuir un peu les luttes de famille. Une fois rentrée au foyer maternel, nous ferons si bien que la belle-mère et son mastodonte de mari prendront la volée et que Rodolphe me restera. Alors commencera ma vengeance, à moins qu'il ne s'a- mende et ne tourne au chien couchant'. Dans ce cas je pourrai peut-être le gratifier d'une laisse et lui permettre de porter mon tapis quand j ï r a i à l'église. A revoir bien- tôt, sois-en sûre ! » Rodolphe était, en effet, sur le point départir, mais la mission n'était qu'un prétexte. Wilhelmine suivait avec une anxiété toujours croissante les phases de ce drame intime et s'effrayait du changement de son fils. Son teint avait perdu la fleur de la jeunesse, ses joues s'étaient amaigries, sa parole était devenue saccadée, sa jovialité native avait fait place à une tristesse profonde dont il s'efforçait en vain de dissimuler l'empreinte. C'est qu'hélas! Le pauvre jeune homme avait bien à souffrir ! Il avait cru