page suivante »
UN MARIAGE SOUS LES TROPIQUES. 237 nemi. Il n'est pas probable que sans une idée préconçue elle eût ainsi manqué à tous les égards, tous les respects, tous les devoirs envers ses parents, envers son mari, en- vers elle-même, dont l'intérêt était certes de vivre enbonne harmonie avec sa nouvelle famille. — Que veut-elle donc? disait Wilhelmine au comte. — C'est une énigme, ma bien chère, mais nous ne pourrons tarder à en connaître le sens. Si c'est le résultat d'une mauvaise nature, nous ne serons que trop tôt édi- fiés sur ce malheur ; si c'est un calcul, il ne peut exiger une comédie éternelle, et nous en saurons le but à notre arrivée à Salta. Continuons le système de concession que nous avons suivi jusqu'à ce jour; évitons les chocs et consomme jusqu'au bout ton sacrifice d'abnégation per- sonnelle. Tu es admirable de dévouement, ma pauvre Wilhelmine ! Dieu te récompensera par le bonheur de ton fils. Et dans cette espérance la comtesse subissait toutes les avanies qu'il plaisait à Herminia de lui infliger. Elle vou~* lait, si Rodolphe devait s'en détacher, que cet éloignement vînt de lui seul de même qu'il avait été seul à décider cette union. Dans la pureté de son âme et la droiture de ses in- tentions, elle ne voyait le bonheur de son fils que dans le strict accomplissement de ses devoirs ; elle souhaitait donc ardemment que Herminia vaincue par l'affection, se ren- dît enfin et fût pour eux tous, non certes la femme qu'elle avait rêvée, mais au moins une compagne supportable, feignant le respect si elle était incapable de le concevoir. Elle sentait que dans les angoisses de son âme l'impartia- lité de son jugement était constamment prête à lui échap- per et, méfiante d'elle-même, elle exagérait sa condes- cence dans la crainte d'exercer une influence fâcheuse sur l'esprit de Rodolphe.