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               UN MARIAGE SOUS LES TROPIQUES.              75

 fert pour deviner la souffrance, et Rodolphe était trop
 absorbé pour voir et entendre.
    — Mon père, dit-il le lendemain de son retour, me
 voici.
    — Et tu n'as pas changé de détermination?
    — Je suis plus décidé que jamais. Je suis convaincu
 que Dona Herminia adorera ma mère quand elle la con-
 naîtra et qu'elle sera pleine de gratitude pour vous et
 d'affection pour moi. Je m'en remets à vous, mon père,
 pour discuter avec le général les termes d'un contrat
 dans lequel je ne veux rien avoir à faire. Je ne me marie,
 point par ambition, peu m'importent donc les conditions à
 stipuler.
    Rodolphe, mon fils! réfléchis encore! songe à l'exil au-
 quel tu te condamnes, aux mœurs que tu auras à réfor-
 mer, pense à la possibilité d'un reg-ret tardif, ne consomme
 point un pareil sacrifice sans en avoir mesuré toute l'éten-
 due. La vie est longue et tu la commences à peine, jouis
 de ta jeunesse, et laisse à l'âge mûr les préoccupations
 qui te dominent. Voyons ! attendrons-nous encore ?
    — Mon père, vous m'avez demandé une épreuve de
 huit jours, je vous ai obéi. Les huit jours sont écoulés et
mes sentiments sont restés les mêmes. Je veux faire ces-
ser un état d'indécision devenu pénible. Les préventions
de ma mère s'évanouiront devant la docilité d'Herminia
et vos craintes devant ma conduite raisonnée. Mais il est
possible que je ne sois point agréé par le général et je
veux savoir à quoi m'en tenir. Je vous supplie donc de ne
plus en retarder la démarche.
   — C'est bien! Rodolphe, fit d'une voix sourde la com-
tesse, qui était entrée pendant l'entretien. Ton père verra
demain le général; mais souviens-toi bien, mon fils, que
nous avons laissé à ta volonté son entière liberté !