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               UN UÀfUAGK SOUS LES TROPIQlîKS.               61

 les filles de ce pays assez présentes à la mémoire et, je
 n'en trouve aucune qui soit digne de te faire perdre la
 cervelle.
    — Vous vous trompez encore, mon père, elle est laide.
    — Mais sais-tu que je n'y comprends plus rien ! s'écria
 M. de Czernyi, visiblement intrigué. Tu n'es pas amou-
 reux, tu choisis une fille pauvre et laide; que diable as-tu
donc! et, d'abord, comme s'appelle-t-elle?
    — Dona Herminia, mon père.
    — Comment, ce laideron? la fille du général? cela devient
curieux. Voyons, mon enfant, conte-moi un peu l'histoire
de tes amours, mais bonnement, sans métaphysique ni
 réticences.
   — L'histoire de mes amours, comme vous les appelez, est
bien courte et je crois, mon père, qu'après l'avoir enten-
due vous me rendrez justice et que vous ne verrez en
 moi ni un fou ni un ambitieux. Le désœuvrement, l'occa-
sion, peut-être une certaine attraction m'ont fait fréquen-
ter assidûment depuis un mois la maison du général. Le
hasard m'a presque toujours fait rencontrer Dona Hermi-
nia seule, et dans ces entretiens commencés par pure po-
litesse, continués avec un intérêt, je l'avoue, toujours crois-
sant et puis dans une intimité absolue, j'ai pu lire à mou
aise dans un cœur dont on ne me défendait point l'accès.
Dona Herminia est bien douée. Elle est laide, mais elle le
sait, elle le dit elle-même, et c'est peut-être une chance de
plus pour l'avenir. Bien que son père se soit peu occupé
d'elle, il n'a pu faire autrement que de l'initier par la
pensée à notre civilisation européenne, et Dona Herminia
méprise profondément les coutumes de son pays. Elle
brûle de s'instruire, tout en convenant d'une ignorance
dont on ne peut lui faire un reproche. Qui lui en voudrait
de ne pa;; savoir, alors qu'il n'existe ici de professeur d'au-