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CHARABARA. 517 plus ou moins à propos suffit pour le meltre en fermentation sans qu'il y paraisse. A grades différents, les relations n'ont jamais une parfaite liberté d'allures. S'il est des exceptions, elles confirment la règle. On a bien des maîtresses ; mais par bonheur, on les quitte comme on les prend, el les bonnes filles vous paient de retour. La plus grande marque d'affection que Gauthier donna à son fils adoptif, fut de rester en repos pendant les Cent-Jours, pour ne pas le laisser en des mains étrangères. Immense sacrifice qui fut bientôt suivi d'une autre épreuve. Il y avait trois ans que le capitaine avait perdu son emploi, lorsqu'il apprit la suppression complète de son traitement et sa radia- tion difinilive des cadres. Il se trouva alors en présence d'un problème difficile: subvenir avec 800 francs par an à tous les besoins d'un homme, d'un enfant et d'un cheval. Une feuille de papier toute barbouillée de chiffres donna natu- rellement une solution négative à la question. C'était un samedi malin; Gauthier baisa l'enfant endormi et sortit à cheval. Il rentra seul et à pied, la sueur au front. Quelques pièces d'or sonnaient dans sa poche. Lucien (c'était, s'il m'en souvient, le nom choisi par Gau- thier pour le Moïse de la Saône), avait entendu cent et une fois le récit des exploits de Wagram et comment celui-ci l'avait sauvé.des eaux. Le narrateur ne jouait en cette affaire que le second rôle. De là élait éclos dans l'âme naïve du petit garçon un vague sentiment d'admiration et de recon- naissance pour ce grand cheval, si doux et si beau, auquel il devait la vie. Cette vie consistait alors à se rouler sur le gazon, à manger d'excellentes choses, à courir tant qu'il voulait, et à se reposer quand venait la faligue.... et certes une pareille existence n'est pas à dédaigner. Tout ce bon- heur était l'ouvrage de Wagram ; Wagram était le bon génie de la maison ; un prestige mystérieux l'enveloppait. Com-