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360                    ORIGINES DE LUGDUNUM.

puissants sur les consciences, jetèrent à la sourde indignation
des âmes les semences de cette insurrection formidable qui fail-
lit, plus tard, arracher les territoires celtiques aux serres expé-
rimentées de Tibère. Le regard perçant d'Auguste vit se former
cette conjuration du sacerdoce druidique ; son esprit, fertile en
ressources, s'appliqua, trente années durant, à la combattre, mais
fut impuissant à la vaincre : elle resta la constante préoccupation
de son gouvernement dans les Gaules.
    Frère de la religion d'Odin, né comme elle, dans le Haut-
Orient, de germes brahmaniques et mazdaïques (1), le druidisme
traçait autour de l'homme moral un cercle infranchissable. Par la
nature absolue de ses dogmes, comme par l'enchaînement systé-
matique de ses préceptes, il demeurait incompatible avec le po-
lythéisme indulgent de Rome et d'Athènes. La croyance à l'im-
mortalité des âmes, telle que l'enseignait la théocratie d'Esus,
 de Widdon et de Teutatès, exigeait des individus non-seulement
 une soumission aveugle, elle exaltait et sanctifiait même leur
 immolation volontaire. D'autre part, le droit d'excomunica-
 tion (Cœs., vi, 43), et la cérémonie de l'épreuve (fodla), dont elle
 gouvernait secrètement les chances, mettaient à sa merci l'hon-
 neur et la vie des sectateurs de son culte. De cette façon, elle
 disposait, pouvoir qui n'appartient qu'à Dieu, des corps et des
 âmes.
    Cetti théocratie inexorable, le second des Césars n'osa jamais
 l'attaquer de front. Tous ses actes, vis-à-vis d'elle, ne sont que
 des demi-mesures où, comme dans l'adjonction de son culte aux
 adorationsMu némète ararique, l'impossibilité de faire plus se
 manifeste à chaque ligne. Une fois, par exemple, il décrète que
 les Gaulois jouissant du droit de citoyen romain doivent, s'ils
 veulent conserver les privilèges attachés à ce titre, renoncer à


   (1) « Sed quîd ego hœc commemorem in arte oceanum quoque trans-
gressa, et ad naturœ inaae pervecta ? Britannia hodieque eam adtonite
célébrât tantis cœremoniis, ut dédisse Persis videri possit. » (Plin., Hist.
mund., lib. xxx, cap. 4). — « Druidse, ità suos appellant magjos. » (ld.,
xvi, 44.)