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130 HOMÈRE. cieux que ces procédés, c'est le sens du vrai. Au milieu de ses fictions les plus hardies, on sent partout l'observateur sagace et sincère de la nature humaine comme de la na- ture physique , et par la surtout la poésie homérique se distingue de celte poésie indienne qu'on aime aujour- d'hui à lui opposer. C'est une comparaison facile à faire en étudiant dans l'Iliade et dans l'Odyssée certains épisodes qui ont leurs analogues (bien qu'on ne puisse guère suppo- ser une filiation directe) dans le Ramâyâna ou le Mahabhâ- rata. On y verra que la muse indienne, parfois si noble et si brillante, se perd trop souvent dans un merveilleux mons- trueux et déraisonnable qui ne laisse aucune place a la vé- rité humaine. Aussi l'Inde n'a pas eu d'histoire, tandis qu'Homère, nous le montrions tout a l'heure, est le devan- cier et le modèle d'Hérodote. Lorsque Thucydide cherche a se rendre compte de ce qu'a pu être l'expédition d'Aga- memnon contre Troie, bien qu'il semble douter sur certains points de la véracité d'Homère, car « en sa qualité de poète, dit-il, il est probable qu'il a embelli les choses en les exa- gérant, » il ne laisse pas toutefois de constater que ses hy- pothèses concordent avec les données de l'Iliade. Sur la gé- néalogie des familles royales, sur les limites et la puissance relatives de ces petites souverainetés, sur les rapports et les guerres des Hellènes soit entre eux soit avec leurs voisins, Homère entre a chaque instant dans une foule de détails d'une précision tout historique, et qui, s'ils ne sont pas vrais d'une vérité absolue (ce qui est si fréquent même dans les histo- riens), étaient vrais au moins comme traditions vivantes et généralement reçues chez les divers peuples de la Grèce. Les historiens des âges postérieurs n'hésitent point à les re- produire comme des faits avérés. Pour n'en citer qu'un exemple, nous retrouvons dans Strabon toute Ja généalogie des fils de Portheus telle qu'elle est exposée au livre xiv de