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                     BlOGlUPFiIE DE LÉON BOITEL.                        23

   Le malheureux naufragé tend en vain sa main fraîche-
ment gantée à ses amis qui se tordent d'hilarité., il est obli-
gé de se hisser seul hors du bassin ; il en sort tout trempé,
salué par les fous rires de la compagnie dont les éclats
bruyants étaient plus que justifiés par l'absence de dan-
ger et la bouffonne prophétie si tôt réalisée. M. Cailhava
survient et dit avec le sérieux le plus imposant : « Ce
n'est rien, c'était prévu; j'avais préparé un vêtement de
rechange. » Boitel, moitié confus, moitié riant courut
se changer de la tête aux pieds et sa joyeuse mésa-
venture fut pendant le reste du jour le sujet d'une
guerre de plaisanteries et d'épigrammes où, quoique seul
contre tous, il ne fut pas toujours vaincu.
   Boitel, nous l'avons dit, rêva la décentralisation litté-
raire, il fit plus que l'appeler à grands cris puisqu'il créa
la Revue du Lyonnais, lice dans laquelle purent s'es-
sayer quelques plumes d'abord timides et que l'exercice
a depuis fortifiées. Il fut membre du Caveau, du Cercle
littéraire. Il fut l'un des fondateurs et des plus joyeux
convives du Dîner des Intellligences à Fourvières (1).
   Voici dans quelles circonstances ces réunions furent
organisées. G-enod, qui a laissé de si vivants souvenirs de
son talent comme peintre et de sa joyeuse humeur, souf-


   (1) Cette réunion de trente joyeux convives qui banquetaient une fois
par mois au pavillon Nicolas, à Fourvières, fut ironiquement baptisée du
nom d'Intelligences par l'éditeur d'un petit journal, piqué de n'en pas
faire partie. La Société résolut de conserver ce nom, en y ajoutant un
L. Elle le garda jusqu'au moment où elle ne battit plus que d'une aile. Son
premier banquet date du 9 juillet 1841. Il existe, au nombre de trente
exemplaires, un petit recueil de chansons, nées de ces réunions, où l'on
recevait et fêtait les artistes et hommes de lettres de passage à Lyon.
(Note extraite du livre des Feuilles mortes de Léon Boitel.)