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                        ORIGINES DE LUGDUNUM.                           357
 dre. Si, en attirant à Rome l'or des Gaules, l'heureux vainqueur
 d'Actium défrayait sa passion pour les embellissements, il met-
 tait aussi à exécution le plan, dès longtemps conçu, d'enlever
 aux Gaulois, dont il redoutait le caractère remuant, les moyens
 d'armer et d'entretenir une révolte. La suite des événements le
 prouva. Forcé par l'exaspération croissante des peuples de se
 rendre à Lugdunum, il confisqua les richesses, mais pardonna
 les crimes du trop docile exécuteur de ses volontés. Il est vrai
 que celui-ci rendit tout châtiment impossible en associant à sa
 conduite, par un aveu devenu publie, l'astucieux et habile Oc-
tave (1). Les populations si indignement pressurées sollicitè-
 rent une indemnité. Réclamations impuissantes ! Le fruit des ra-
 pines de Lieinius, au lieu de retourner à sa source, suivit le maî-
tre au-delà des monts (2). Ce fut au milieu du mécontentement
 excité par toutes ces causes de désaffection que Drusus convoqua
 les états de la Gaule.
   Ce simple exposé, qu'aucun parti pris n'exagère, démontre
jusqu'à l'évidence que, loin d'avoir été voté par acclamation, le
monument de l'embouchure de la Saône fut le résultat d'une sur-
prise, le produit d'une pression exercée sur les consciences.
L'empereur, en celte circonstance comme en une foule d'autres,
mit en œuvre la rare dextérité politique que le ciel lui avait dé-
partie. Usant du vieux stratagème dont le sénat, autrefois, s'était
servi pour endormir la vigilance du peuple Hellène (3), il mani-

   (1) Hœc, inquit, domine, data opéra tua ac Romanorum causa collegi,
ne indigenœ tanta vi pecunise instructi deficerent ; ilaque omnia et conser-
vavi tibi et nunc do. lta Lieinius, quia vires Gallorum in Augusli gratiam
enervasset, discrimen evasit. (Dion. Cass., 1. LIV, C. 21).
   (2) Cette impunité porta l'exaspération des vieux Celtes à son comble.
Un grand personnage de la Gaule résolut même d'assassiner l'empereur au
passage des Alpes; mais, dit Suétone, il fut tellement intimidé par la ma-
jesté calme et sereine du maître de Rome, qu'il n'eut pas la force d'exé-
cuter son projet. « Vultu erat adeo sereno tranquilloque, ut quidam e pri-
moribus Galliarum confessus sit inter suos eo se inhibitum ac remollitum
quominus. » (in August., n° 79.)
  •(3) Tit.-Liv., lib. xxxm. ch. 32.