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SAINT MAURICE ET LA LÉGION THÉBÉENNE La nuit vint ensuite. Cette nuit mémorable fut splendide. La lune argentait les cimes neigeuses ; les étoiles scintil- laient; l'air était doux, et le grave murmure des sapins se mariait à l'harmonie sauvage des cataractes. On voyait dans le camp romain un immense mouvement, une circulation in- cessante, une agitation inaccoutumée. L'écho répercutait a chaque instant le cri strident des ordres militaires. D'obscè- nes refrains se croisaient avec des imprécations de toute sorte. Les soldats buvaient a même à de grandes amphores pleines de vin et d'hypocras qui circulaient et se vidaient sans cesse. Parmi eux, les uns, rendus féroces par l'ivresse, étalaient une joie cynique; les autres, sombres et mornes, s'asseyaient et penchaient la tête dans leurs mains accablés sous le poids de l'effroyable consigne du lendemain. Tous apprêtaient et fourbissaient leurs armes comme pour une grande bataille. Pendant ce temps, il se passait des choses sublimes au camp d'Agaune. Maurice, Candide et Exupère avaient une notion trop exacte de Maximien et de sa haine implacable (1) Voir la dernière livraison de la Revue.