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HOMÈRE. 123 de la tragédie et de la comédie l'adopteront, comme le plus sonore et le plus pénétrant, pour émouvoir le peuple d'Alhè- nes pressé sur les gradins du théâtre. Mais déjà dans les îles éoliennes et sur les côtes de l'Asie grecque résonne un ins- trument nouveau, ou plutôt renouvelé. L'ancienne lyre des aèdes a été transformée par le lesbien Terpandre. Aux ac- cords d'une musique plus savante et souvent associée à la danse , la poésie, elle aussi, se plie à des mouvements plus rapides ; elle abandonne les longs vers pour des mè- tres plus légers, plus variés; eile se découpe en strophes, ce qui lui donne des ailes pour voler, comme dit le poète, « par la bouche des hommes. » L'ode, sous ses différentes formes, remplace pour un temps tous les genres antérieurs. Dans les temples elle est la voix de la prière; c'est par elle que s'exhalenttantôtla patriotique et belliqueuse colère des oppri- més, comme Àlcée, tantôt les ardeurs passionnées de Sapho ou les voluptueux caprices d'Anacréon. Que de noms illus- tres ! Que de poètes charmants ou sublimes dans cette période de cinq cents ans qui ouvre la littérature grecque, d'Homère à Pindare ! Mais Homère, le premier en date, est aussi le plus grand, soit par l'importance des oeuvres qui nous sont parvenues sous son nom, soit par la supériorité du génie dont elles portent l'empreinte, soit surtout par l'incompara- ble influence qu'elles ont exercée sur l'esprit humain. Sans doute avant le chantre de l'Iliade et de l'Odyssée il il y eut d'autres poètes qui lui préparèrent,la voie. D'un côté, il est impossible de supposer que l'épopée ait pu s'éle- ver de son premier bond a une telle hauteur; de l'autre, nous trouvons dans Homère lui-même l'indication de chants, de poèmes qui nous donnent l'idée de ce qu'était avant lui la poésie. Ce Phémius, ce Démodocus, qu'il nous montre h la table des princes, chantant déjà les malheurs de Troie et les aventures des dieux, ne sont certainement point des por-