page suivante »
102 LA BAUMACHIE LYONNAISE. Tient, comme un bois qui dort, en suspens son haleine, On ne voit, on n'entend que les vingt matelots Du bateau bleu, dn rouge, avançant sur les flots. Soudain, les vingt rameurs tous à la fois se couchent. Les lance, en ployant, sur les boucliers touchent Et l'un des champions, dans le choc enlevé, En tombant disparait sous l'humide pavé. Le bruit des instruments, une clameur immense, Remplissant l'air, alors succèdent au silence-, Et, pour laver sa honte, en revenant sur l'eau Le vaincu savamment regagne son bateau. Mais de l'absent un autre a déjà pris la place. Pour la seconde fois, en traversant l'espace, Les rouges et les bleus se rencontrent de front; Pour vaincre de nouveau, pour venger leur affront. Sur chaque bouclier la lance encor s'engage De part et d'autre avec un égal avantage. Les lutteurs sont campés sur leurs jarrets nerveux ; On dirait qu'en dépit d'un élan vigoureux Us feront reculer les bateaux en leur route, Et la foule muette, en tressaille de doute. Pourtant, l'un des jouteurs, sur sa base ébranlé, Un moment indécis, à genoux, a roulé. L'autre, qui tient déjà sa victoire, l'achève; En pesant sur la lance à moitié le relève Et, d'un bond imprévu le poussant devant lui, L'envoie au fond de l'eau reprendre son appui. Le peuple bat des mains après chaque déroute, Après chaque victoire, et l'on poursuit la joute. Chacun à réparer bientôt compte un échec Et dans les deux bateaux personne n'est plus sec.