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I.A BELLE REGAILLETTE. 85
On dit que parmi ces bombes amoureuses, il y en avait
beaucoup qui contenaient de lendres billets, Ã l'adresse des
plus jeunes et des plus belles Marseillaises.
Mais, chose bien digne de remarque ; Ã toutes ces agace-
ries du Sire chevalier, il n'y eut pas une seule réponse.
Les femmes de la cour de François 1 er n'en voulaient rien
croire; Brantôme aurai! formellement nié. Lafonlaine, peut-
être, en eût douté.
Moi, je n'en doute point.
La ville de Marseille est encore remplie de souvenirs char-
mants et d'attestations, pour ainsi dire vivantes du courage,
de la vertu, de la beauté historiques des femmes de Mar-
seille.
Il y a peu d'années, on voyait encore à Marseille, derrière
les maisons qui bordaient les quais de la Consigne, tourner
et serpenter, comme un lézard courant sous les feux du so-
leil, une rue étroite et tortueuse, désignée sous le nom des
Trois Soleils. Or, voici le triple phénomène qui valut à celte
rue son nom flamboyant.
Vers le commencement du seizième siècle, il y avait lÃ
troisfilles,que les Marseillais, dans leur langage coloré, com-
paraient au soleil, parce que ces trois jeunes filles, d'une
chasteté exemplaire et d'une merveilleuse beauté, brillaient
au balcon de leur maison , sous les nervures de ses étroites
fenêtres en ogives, comme l'astre du jour, apparaissant entre
des nuages.
Dans l'enthousiasme qu'elles excitaient, on ne se contenta
pas de comparer au soleil ces jeunes filles, dont les yeux,
dit un des chroniqueurs du temps, « produisaient, sur ceux
qui les regardaient, un mirage éblouissant; a mais on voulut
encore que la rue , où rayonnaient leurs beaux visa-
ges, conservât dans l'angle d'une chétive maison le souvenir
de leur apparition sur la terre. La rue fut appelée des