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238 BIBLIOGRAPHIE. style, la faiblesse de ses conceptions; le second, moins brillant, moins ciseleur, mais s'abreuvant à la vraie source, au génie an- tique, et demandant le succès aux sentiments qui caractérisent le peuple grec, c'est-à -dire l'amour de la patrie, de la liberté et de la gloire. C'est à l'école de ce dernier que l'avenir appartient. M. Yemeniz consacre la dernière de ses études à la comédie et à la satire. Les Grecs d'aujourd'hui, comme leurs aïeux, s'occu- pent avec passion des affaires de l'État. L'Agora sert, comme autrefois, de rendez-vous à une foule d'orateurs de toute classe qui viennent discuter sur la chose publique. Il en résulte que la eomédrS actuelle, pour répondre aux goûts de la société grecque, doit être nationale et politique, comme l'était la comédie d'Aris- tophane. Notre auteur analyse rapidement l'œuvre de M. Rizo Rhangabe, esprit aux aptitudes très-diverses, puisque après avoir écrit de beaux chants Mephtiques, il sait, en un style élégant et tout à fait athénien, faire entendre au peuple et au gouvernement les enseignements de la comédie. Enfin l'auteur de la Grèce moderne clôt son livre en parlant de M. Alexandre Soutzo, poète satirique d'un grand mérite. M. Soutzo est, en politique, la personnification complète du peu- ple athénien ; il en a les qualités et les défauts ; l'amour de la liberté et de la patrie d'une part; de l'autre la mobilité et l'amour de l'opposition. Ce satirique a tout attaqué dans l'ordre politi- que, les hommes et les choses, avec une verve excessive. C'est un de ces hommes dont on admire le talent, qu'on estime, à cause de l'indépendance de leur caractère, mais qui ne peuvent être l'objet d'une sympathie complète. Souvent M. Soutzo a été égaré par la passion ; plus d'une fois il lui est arrivé de blesser le sentiment national lui-même. Tantôt il fait l'apologie de l'as- sassinat politique ; tantôt, comme Béranger, auquel il ressemble en beaucoup de points, il parle de la divinité d'une façon scep- tique et irrévérencieuse. Si de telles plaisanteries peuvent trou- ver chez nous quelques échos, il faut dire, à la louange du peuple grec, qu'elles sont chez lui très-peu goûtées et très-mal accueillies. Tel est ce livre de la Grèce moderne, dont quelques parties avaient déjà été publiées dans la Revue des Deux-Mondes en 1859