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                          LA SAINT-MARTIN.                          61

san. Si les refrains des faubourgs de nos grandes villes arrivent
trop souvent jusque dans nos villages, il se trouve encore quelque
rustique auteur qui tient en honneur l'idiome natal, ce lien puis-
sant des populations avec leur berceau. Nous devons à ce propos
un souvenir au premier chanteur distingué que nous ayons enten-
du sous le chaume ; c'était un garçon meunier du moulin de Mon-
falconnét, il y a bien longtemps déjà :

            Tandis que son moulin broyait l'orge et le seigle,
            Lui couché sur les sacs, suivant son goût pour règle,
            Tout en voyant tomber la farine et le son
            Et sa meule tourner, tournait une chanson...


   Le calme de la vie rustique se reflétait fidèlement dans les
 chants et dans les airs dont il était l'auteur ; et en l'entendant,
l'on comprenait qu'au milieu d'une civilisation avancée ceux qui
s'en enorgueillissent et ceux qui en souffrent peuvent sourire
encore à ces traits des mœurs primitives, à l'écho de ces chansons
dont, le soir, le bruit lointain charmait leur jeunesse.- On aime à
chanter en Bresse : l'enfant chante dans les prés et les pâturages
en gardant les bestiaux ; c'est souvent en chantant qu'il parcourt
la longue distance du hameau à l'école ou au catéchisme ; — le
laboureur a sa chanson à laquelle les bœufs ne sont pas insen-
sibles, car son mode lent est bien d'accord avec l'effort du couple
attelé qui trace le sillon; le soir en hiver on chante à la veillée ;
on revient en chantant au hameau quand on rentre du cabaret le
soir après une bouteille bue.
   On ne s'étonnera donc pas qu'un Bressan ait chanté en patois
la Saint-Martin, cet événement notable en Bresse. La poésie rus-
tique de M. Melin, qui a aussi célébré la VEILLÉE, nous a paru
pouvoir être encouragée et reproduite ici, ne fût-ce que pour
honorer ce courageux partisan des airs bressans qui avait voulu
en rajeunir le goût en créant un orphéon parmi nos ouvriers.
Nous regrettons de ne pouvoir y ajouter l'air dont M. Melin est
aussi l'auteur, et dont le refrain est emprunté à l'un de nos plus
gracieux rigaudons.