page suivante »
NICOLAS BERGASSE. 27 disait-il, s'il n'était pas établi qu'aucun acte de l'assemblée n'aurait force de loi qu'après avoir été librement consenti par le prince, le pouvoir de l'assemblée serait illimité, et tout pouvoir illimité est contraire à l'essence même d'une cons- titution libre. La France , qui avait applaudi au courage des parlements refusant d'enregistrer des édits impopulaires, ne comprendrait pas que le premier magistrat de la nation fût condamné à faire exécuter des mesures qu'il n'aurait pas approuvées. Toutes les consciences ne pouvaient être libres, excepté la sienne. La constitution, palladium inviolable des droits du peuple , ne devait pas être pour le chef du peuple un fardeau et une honte. « Puisqu'il vous faut une consti- tution monarchique, concluait Bergasse avec une hauteur de raison à laquelle on n'a pu s'élever en 1814 et en 1830, acceptez-la en hommes de sens, avec ses conditions indispen- sables; organisez l'accord et non la guerre civile entre les deux pouvoirs; mettez des bornes à la volonté du monarque, mais ne cherchez pas à le déshonorer. » Un détail personnel vint prouver à l'écrivain combien on marchait vite en effet vers le moment où le pouvoir de l'as- semblée allait devenir le seul pouvoir. Empêché par la pré- cipitation des meneurs de la majorité de prononcer ce discours à la tribune, et voulant le faire connaître au pays , il fut obligé d'avoir recours à un imprimeur de sa ville natale (1). Les boutiques de Paris regorgeaient de pamphlets contre Louis XVI et sa famille, mais personne n'osait prendre parti contre un décret rendu par la Constituante. Elle n'avait pas cependant six mois de durée, et l'on n'était encore qu'au mois de septembre 1789 ! En décidant, contre le vœu de la majorité des membres du comité de constitution, que la représentation nationale ne (1) Chez Aimé de la Roche, à Lyon, aux Halles de la Grenette.