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398                    M. CHENAVARD.

navard est Lyonnais; il appartient exclusivement a la province.
Il a respiré dans cette grande cité, a la fois industrielle et
lettrée , l'atmosphère intellectuelle des Ballanche , des
Laprade, ces poètes de la mélancolie, modernes par ces
vagues et rêveuses tristesses que l'antiquité semble avoir
peu connues, antiques par le souffle mélodieux de leur ins-
piration , par la souple élégance, par le rhythme ample et
doux de la prose et du vers. Comme eux, M. Chenavard a
échappé a l'influence du romantisme ; il est resté fidèle à la
muse qui l'a visité dans son berceau. Sa véritable patrie est
la Grèce. 11 a le sentiment de ces belles formes, de cette élé-
gance sculpturale , de ces lignes harmonieuses qui ont
besoin, pour avoir toute leur valeur, d'être baignées dans
l'azur d'un ciel grec. Même quand il touche à un art qui
n'est pas le sien, quand il élève une tour gothique et une
façade ogivale, on sent, sous cette traduction de sa pensée
dans une langue qui lui est étrangère et qu'il parle cepen •
dant avec une irréprochable pureté, on sent sous ce voile la
grâce transparente et comme la nudité lumineuse du génie
hellénique. M. Chenavard est Grec moins par imitation et par
choix que par la nature même de son esprit. L'imitation est
rarement aussi fidèle. Lorsqu'au dix-septième siècle Lebrun
 peignait les batailles d'Alexandre, que Carrey dessinait les
 frises du Parthénon, ils croyaient imiter et copier les Grecs.
 C'était encore leurs modèles que croyaient suivre Mansard,
 lorsqu'avec des entassements splendides et une fougue pleine
 de magnificence, il adaptait la richesse corinthienne et les
 formes architecturales de la décadence aux grandeurs de
 Versailles ; et cependant qui rappelle moins la Grèce que
 ces imitations et ces copies? L'imitation a elle seule ne peut
 produire que de pâles ressemblances, elle ne communique
 point à ses œuvres la sève et la vie : Fénelon, André Chenier,
 qui ne copiaient personne, étaient tout empreints d'hellé-