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96 LES VILLEROY. vaient littéralement sur cette famille. Nous n'énumèrerons" pas toutes les largesses dont cette royale amitié fut la source. Quelques passages de Saint-Simon suffisent pour nous en donner la'mesure. Au voyage de Fontainebleau de 1699, le roi donna trois cent mille livres au maréchal de Villeroy à prendre en six ans sur Lyon. Au bout de ces six ans, le même don fut renouvelé. Les réflexions que ces libéralités exagérées inspirent au célèbre annaliste, méritent d'être ici consignées, car elles peignent sous des couleurs saisissantes la situation qui à cette époque était celle de notre ville : « La faveur du maréchal n'eut qu'à maintenir ce qui était établi. Il disposa&-doné seul de toutes les charges municipales de la ville; il nommait le prévôt des marchands. L'intendant de Lyon n'a nulle inspection sur les revenus de la ville qui sont immenses et peu connus dans leur étendue, parce qu'ils dé- pendent en partie du commerce qui s'y fait, et qui est toujours un des plus grands du royaume. Le prévôt des marchands l'administre seul et n'en rend compte qu'au gouverneur tête a tête, lequel lui-même n'en rend compte a personne. Il est donc aisé de comprendre qu'avec une telle autorité c'est un Pérou, qui rend la protection du gouverneur continuellement nécessaire à tous ces gros négociants de Lyon, comme à tous les autres bourgeois de la ville, où tout depuis un si long temps dépend de la même autorité, tout est créature des gouverneurs , et rien ne se peut que par eux qui in- fluent jusque dans les affaires particulières de toutes les familles. » Une si grande puissance, tant de richesses et d'honneurs, ne pouvaient exister sans faire des jaloux, non pas a Lyon,où nul n'eût osé prétendre a un rôle de cette nature, mais à Paris, a Versailles, où les Villeroy trouvaient dans la haute noblesse des égaux qui, tout en les acceptant, en les recherchant même, appelaient en secret les occasions de rabattre leur orgueil.