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-Î92 M. VICTOR DE LAPRADE. surtout qui se sont infructueusement essayés au même tra- vail ne sauraint méconnaître la grandeur de l'effort et la va- leur de la victoire. J'ai écrit le mot : effort, et a dessein; peut- être serait-il vrai de dire que, dans les Poèmes èvangèliqties, on sent un peu le travail, et que les traces en restent visibles pour l'œil exercé et attentif ; mais que de beautés couvrent ce défaut, d'ailleurs à mon avis inévitable ! Portraits de Jésus, du Précurseur, de Lazare, de Magdeleine ; paroles sublimes, attendrissantes, célestes du Sauveur, cris inspirés de la péni- tence au désert, cris indignés de la vertu tonnant contre l'orgie d'une cour impure, larmes de Magdeleine, douces, pieuses, ineffables ; tempêtes effrayantes du flot ou de l'âme, apaisements divins, que de pages admirables ! que de ravis- sants tableaux ! et que de beaux ou bons sentiments captifs au fond de l'âme le poète dégage, et fait rayonner aux plus hauts sommets ! Et cela, toujours dans un vers plein, harmo- nieux, travaillé avec cette lente perfection, devenue si rare, et seul appel cependant auquel puisse répondre la gloire, et faire écho la postérité. Car je ne puis me défendre de le répé- ter , contre toutes les tendances de l'époque, contre tous les exemples des maîtres si dédaigneux, à celle heure, et du public et de l'art, M. de Laprade ne s'est pas lassé de bien faire ; il a demandé à un travail obstiné , persévérant , la continuation de ses succès, et c'est par là surtout qu'il res- tera, alors que tant d'œuvres entourées aujourd'hui, ce sem- ble, de l'immortel rayon, seront livrées à l'oubli mérité. Je n'oserai dire que la poésie des Poèmes évangéliques soit plus pure, plus correcte , mieux écrite que celle des ouvrages précédents; mais en échangeant cet horizon de la muse païenne, tout de petites fleurs, de petits ruisseaux et de petits bosquets, pour l'horizon immense, sans limites, de l'idée chrétienne, elle a acquis une inspiration plus haute, un plus magnifique développement, plus-d'ampleur, tout en res-