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                    LES TOURISTES À KOME.                     47

 gibier. Le garçon, voyant qu'ils étaient à la fin de leur repas
et présumant qu'ils voulaient un plat de dessert, leur apporte
deux oranges. Nos deux provençaux philosophes échangè-
rent un coup d'oeil de résignation et mangèrent chacun une
orange en guise de gibier, au grand contentement du garçon,
qui fut enchanté de comprendre si bien le français. Malgré
cette mésaventure, je suis persuadé que nos deux compa-
triotes, revenus dans leur pays, ont affirmé que tout le monde
entend le français à Rome, et que la connaissance de j'iJa-
lien est parfaitement inutile.
   Au reste, cette assertion est à peu près générale et n'est
pas étonnante, car, pour le touriste, la population romaine
consiste dans les employés de l'hôtel et dans le savant cicé-
rone dont il écoute les oracles. Je ne sais même pas si, pour
quelques-uns, le plus comme il faut, parler l'italien n'est
pas mauvais genre.
   J'ai dit que le touriste adopte sans réflexion une foule
d'idées ayant cours dans le monde et reçues générale-
ment comme l'expression de la pure vérité. Aussi, d'après
les rapports unanimes , embellis par une admiration
de commande, on arrive tout exprès pour le carnaval
ou la semaine sainte. Je comprends très-bien que des
hommes croyants et religieux, qui n'ont jamais pratiqué
Borne, s'y rendent avec l'intention d'assister aux fêtes de
Pâques; mais que des gens un peu raisonnables viennent,
de propos délibéré, perdre dix jours au milieu des folies
carnavalesques de la -ville de Romulus, de Constantin et de
papes, voilà ce que je ne peux concevoir. S'il s'agissait de tout
autre ville, je comprendrais une semblable idée. Il y auçait
de la part du touriste légèreté et amour des plaisirs; mais
choisir Rome pour satisfaire ces goûts de dissipation, •est
une marqua d'oblitération intellectuelle. Dans tous les cas,
ce carnaval est la chose la plus vulgaire et la plus mono-