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348 L'AGER GOFIACENSIS. Et cependant on sent que celle population si croyante, si zélée pour les pratiques religieuses, n'a pas encore été complètement pénétrée par la civilisation chrétienne. Il lui reste à adoucir ses mœurs, à dompter les passions violentes de la race barbare. Il est surtout une vertu qu'il lui faut acquérir, le respect de la propriété. A cette époque,il y a si peu de garantie sociale que,pour assu- rer l'exécution d'un acte de libéralité, il faut recourir aux terreurs inspirées par la religion et prononcer l'ana- thème contre ceux qui porteraient atteinte aux droits concédés. Telle est la sanction ordinairement exprimée dans les chartes de donations faites aux églises. Malgré les termes peu explicites des cartulaires, on voit aussi que ces actes ne sont souvent que des restitutions dé- guisées, faites par quelque seigneur féodal. Rien n'est sacré pour ce descendant des anciens envahisseurs du sol national : après avoir rançonné le marchand ou le voyageur qui passe sur ses terres, il faudra encore qu'il s'empare des possessions de l'abbaye et qu'il mette la main sur le sanctuaire. Vers le milieu du Xe siècle l'église de Saint-Maurice relève de Savigny et fait partie à ce litre de l'obédience de Mornant (1). Mais un siècle plus tard nous la voyons aux mains de deux seigneurs nommés Gauzerand et Hugues ; tous deux en font dona- tion, avec les dîmes et les droits qui en dépendent, aux moines de Savigny et de Mornant. Et cette donatioii est renouvelée à dix ans d'intervalle par le fils de l'un des deux bienfaiteurs (1060, 1070). Mais une semblable con- cession n'est pas une garantie suffisante à cette époque (1) Sav. ch. 129,