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158                           UNE VISITE.

chef-lieu de l'Isère, « faire un tour au Musée d'antiquités »
ou « derrière les buissons » doivent être des expressions
parfaitement synonymes.
   Je sais bien que mes objurgations, que je voudrais pouvoir
élever h la hauteur d'un scandale, sont des paroles jetées au
vent, de ridicules diatribes de vieil antiquaire atrabilaire dont
on sourira avec dédain, et que nos bons Grenoblois ne déro-
geront en rien à leurs habitudes et n'en persisteront pas
moins à manquer de respect a leurs inscriptions, comme si
ce n'était pas en même temps se manquer de respect a eux-
mêmes. Ils n'y prennent sans doute pas garde; mais,
lorsque après avoir eu la déplaisante disgrâce de s'appeler,
dans le principe et pendant des siècles « Cularenses »
(mot qu'un terme tout a fait incongru pourrait seul rendre
en français (l),on est devenu, par un galant caprice de la
fortune, « Gratianopolitaihs », est-ce ainsi répondre aux
obligations de son nom? est-ce la se conduire en « gra-
cieux citadins », en gentils et courtois citadins, ou bien
plutôt en barbares vicani, gaulois de Cularo9 C'est avoir
peu fait que d'avoir changé de nom ; car si, malgré tout, le
nom originel, imposé par la nature des lieux et pour ainsi
dire incarné, le nom vrai et significatif s'obstine à repa-
raître invinciblement dans les habitudes, sous la fausse
enseigne du nom de hasard, que faut-il en penser, sinon
que le bienveillant empereur romain aura perdu sa peine à
vouloir débarbouiller des vilains... Aussi longtemps que vous
continuerez \ détruire ou à laisser perdre vos inscriptions à

   (1) Cularo, Culoz, Recuiaz, sont autant de flagrantes onomatopées.
Une commune et parlante étymologie signale ces lieux comme accules,
reculés loin en arrière, tout au fond, tout à l'extrémité d'impasses :
ad culum, ai culum exlremum. L'ethnique Cularenses ne peut pas se tra-
duire en français autrement que par Culards. « Cularois » rendrait servile-
ment les syllabes, mais non le sens du mot latin.