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88 CHRONIQUE LOCALE. Les belles toiles l'emportent sur les médiocres ; succès de qualité complet. — La Bibliothèque du palais des arts est, depuis quelques jours, ouverte au public de six heures à neuf heures du soir. L'affluence des lecteurs est telle qu'on a dû mettre les deux salles à leur disposition. — On a beaucoup remarqué, ces jours derniers, chez Dusscrre, deux éblouissantes gravures : Notre-Dame de Paris et Chambord. On voit encore aux mêmes vitrines un tableau de Bonnefond du plus puis- sant coloris, une Italienne assise dans un paysage. A la foule qui se presse devant cette exposition journalière en miniature, onpeujuger de l'amour de notre population pour les arts. — Le Grand-Théâtre nous promet l'exhibition prochaine de deux opéras nouveaux : Robinson Crusoé, par l'infatigable Offenbach, et Roméo et Juliette, par Gounod, tous deux montés avec un soin rare en province. Les Célestins annoncent la désopilante plaisanterie de Y Œil crevé. Une bonne nouvelle nous vient de ce côté ; Ménéhand et Tony Seiglet, deux noms aimés du public, seraient engagés pour la campagne pro- chaine. — Un artiste qui cumule tous les genres, qui joue la comédie et le drame, chante l'opéra, fait ses pièces, ses décors et ses acteurs, Lemercier de Neuville, a donné à l'hôtel Collet une suite de représen- tations qui ont été fort suivies. Ce n'était pas déjà un banal spectacle que de voir la haute société de Lyon, parmi laquelle de graves magis- trats, rire d'un franc éclat aux mésaventures de Belenfant, aux plai- doiries de M" Jules Favre, et aux dépositions de MM. de Girardin, Thiers, Dumas, Victor Hugo, Soulary. Les Pupazzi sont partis, mais en promettant de revenir et en nous donnant rendez-vous l'année prochaine dans les splendides salons de l'hôtel Collet, où ils ont reçu si bon accueil. — A la dernière séance publique de la Société impériale d'Agri- culture de Saint-Etienne, M. Michalowski a prononcé une allocution colorée et spirituelle sur la nécessité du travail intellectuel ; M. le docteur [Maurice, un rapport sur les travaux de la Société; enfin, M. Abrial, un discours chaudement applaudi sur l'importance des études économiques dans les contrées industrielles. — Un poète de notre voisinage, qui a consacré de nobles chants à une grande infortune, a quitté les hauteurs de la poésie épique, et, snivant le sentier de la fantaisie, chanté, dans un charmant badinage : Le carlin vengé, apologue danois en vers Paris, Amyot, 1867, in-8°. Il ne nous est pas permis de soulever le voile transparent à travers lequel nous apercevons deux énormes bouledogues s'entredévorant après avoir étranglé de concert un pauvre petit chien sans défense, mais nous pouvons louer sans restriction l'élégance du style et le charme du récit. Ce n'est pas la première fois que de grands person- nages se sont distraits de leurs travaux par une fine plaisanterie. Ingres, Delacroix et Yernet ont dû laisser de joyeuses pochades qu'ils ne signaient pas, mais dans lesquelles on reconnaissait à première vue le pinceau du maître. v A. V. AIMÉ V1NGTHIN1ER, directeur-gérant.