Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
                           LA SUAVI0LA.                       447

      — Hélas ! se disait-il, ne l'ai-je vue que pour mieux con-
   naître l'isolement?
      Se croyant oublié, il se livrait au chagrin de l'abandon
  avec cel affaissement découragé qui était une disposilion de
• sa nature.
      Heureusement celle situation ne se prolongea pas long-
  temps,
      Un matin, au moment où il ouvrait sa fenêtre, il aperçut
  un homme qui sortait de derrières les rochers environnants.
  C'était un mendiant que les douaniers connaissaient pour
  l'avoir vu souvent dans la contrée, el qu'ils avaient fini par
  laisser errer sans défiance, malgré la lréquence de ses courses
  au-delà de la frontière.
     D'ordinaire, lorsque cet homme arrivait devant le bâtiment
 près duquel il se trouvait en cet instant, il se hélait de tendre
 la main, de recevoir l'aumône et de continuer son chemin
 après avoir brièvement remercié par cette invariable formule :
 Dieu vous bénisse!
     Jamais il ne prononçait uns parole de plus.Les douaniers,
 le prenant pour un idiot et ne lui connaissant point de nom,
 ne i'appelaienl que l'Innocent.
     Cetle fois le mendiant en voyant Etienne, s'assit sur une
 roche, et lui fit signe de venir le joindre au dehors.
     Etienne, en qui le sentiment de l'attente se réveilla aus-
 sitôt, se précipita vers le mendiant qui, se bornant à lui dire :
 Dieu vous bénisse! glissa un papier dans sa main el disparut,
     Le papier qu'Ktienne venait de recevoir ne contenait que
 ces mots :
     « Ce soir, après le coucher du soleil, je serai au carre-
 four de la Madone. Viens-y ! »
     Si le découragement avait aisément pénétré dans le cœur
d'Etienne, l'espoir y pénétra plus aisément encore, et ce
simple billet suffit pour rouvrir a son imagination impres-