page suivante »
300 VOYAGE A ROME. farouches, indignés du frein de fer qui traverse leurs na- rines fumantes, poussant droit devant eux et se traînant sur les genoux quand leur sabot manque sur le pavé glissant.,, et les mendiants à plaque ou sans plaque .. et les capucins. — Hum! les capucins... ils sont bien laids... aussi laids que les petits abbés sont jolis... Voyez encore !.,. Au bout d'une impasse, un antre ouvre largement sa porte surbaissée.Vous lisez au-dessus : Albcrgo ou Officia di cucina, — c'est un hôtel, ou mieux une auberge. La salle à manger, qui est aussi la cuisine, haute, vaste, enfumée, exhale un parfum d'huile rance et de parmesan, combiné avec l'odeur des écuries, dont vous apercevez tout là -bas, et sans séparation aucune, les voûtes se prolonger a des distances inconnues et se perdre dans l'ombre. Un feu de fournaise rôtit des monceaux de viandes et chauffe des armées de casseroles. Là grillent des agneaux entiers ; là mijotent des chaudières de macaroni. A la lueur de cet incendie, vont, viennent, crient, mangent, discutent, boivent, les paysans des Romagnes, venus de trop loin pour regagner leurs pénates. Corsages écarlates des femmes, grandes barbes des hommes, yeux étincelants, poses théâ- trales et drapées, éclat des cuivres qui reflètent le rouge éclair des flammes, chiens des Abruzzes circulant autour des tables... il y a là un tableau complet, magique de couleur et superbe de lignes... Mais, pour Dieu ! ne goûtez pas aux sauces !... Sortons du bouge, et d'un bond... de plume... tombons au pied de l'obélisque, centre de la place Saint-Pierre. Qui n'a pas vu Saint-Pierre n'a rien vu. Cela dépasse l'imagi- nation. Aussi, comme vous le savez, n'est-ce point l'œuvre d'un seul homme ; et pourtant, nul manque d'unité, rien de disparate. D'où nous sommes, la façade ne produit pas tout d'abord l'effet attendu. Tout est harmonieux e( tout est