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2!)S                    VOYAOE A ROME.

    Rendons, en passant, hommage à l'édilité romaine. Depuis
 des siècles elle entretient avec intelligence les restes ma-
 gnifiques d'un passé qui, sans ces pièces à l'appui, paraîtrait
 fabuleux. Pas de regrattages, pas de replâtrages. Ici une clef
 pour soutenir une assise branlante, là un contrefort pour
 caler un mur croulant. Rien de repeint, rien de maquillé,
 rien de rajeuni. Chaque ruine conserve son caractère de
 ruine, et n'en paraît que plus respectable, comme une
 femme de cinquante ans qui avoue ses rides. On a consacré
 nombre de temples au culte chrétien ; mais alors la transfor-
 mation est complète. Ce n'est pas une réparation, c'est une
 résurrection. Le monument a été renouvelé avec une en-
 tente si parfaite de l'effet et du caractère, que l'on est tout
 étonné en apprenant qu'il n'a pas été bâti tout exprès pour
 une église.
    Exception : le Panthéon d'Aggripa, vaste coupole sur-
montée d'un clocher maladroit qui jure avec la forme ullra-
païenne de l'ensemble.
    Arrivés a Rome par une nuit noire, nous avons a grand'
peine gagné notre lieu de casernement, le fort Saint-Ange.
Les rues étaient désertes. Je serais bien embarrassé de dire
par quelle série de détours, de crochets et de contre-mar-
ches nous nous sommes enfin trouvés en face du mausolée
d'Adrien. Quelle tour! une montagne de maçonnerie! Les
couloirs et les passages n'ont pas l'air d'avoir été ménagés
pendant la construction, mais creusés dans la masse comme
des galeries de mine. Il y a la toute une petite ville militaire,
ateliers, magasins, casernes, écuries, poudrière, le tout
juché sur les remparts ou enfoncé sous les bastions. Au-
dessus se dresse la statue de saint Michel, fort belle peut-
être. Mais la silhouette de l'archange, avec les ailes éten-
dues, se découpe toute plate sur le ciel bleu, comme une
ombre chinoise. On dirait une chouette gigantesque. Appe-