page suivante »
390 L'EXPOSITION DE 1879 verie dont nous avons admiré et admirons tous les jours davantage les bords de l'Oise à Méry, nous a aussi envoyé un effet de lune. C'est le lever de l'astre qu'il nous peint et il choisit le moment où, surgissant au-dessus des brunies du soir, il prend possession du ciel et fait disparaître par son rayonnement les dernières lueurs du crépuscule; c'est rendu avec un sentiment de vérité et de poésie qui caracté- rise le talent de M. Beauverie. Ce même sentiment nous le retrouvons dans une petite toile du môme artiste, toile perdue dans un coin de la galerie Bernard et devant la- quelle nous est revenu en mémoire ce qu'écrivait, un jour, Théophile Gauthier à propos des Chevaux de halage de Decamps : « Les soi-disant réalistes feraient bien d'étudier « cette toile, ils y apprendraient comment on peut donner « de la beauté et de la poésie aux objets les plus vulgaires « avec une exactitude d'imitation qu'ils n'atteindront ja- « mais. » En effet, quoi de plus simple, de plus vrai et de moins vulgaire que ce brave paysan qui, rasé de frais et heureux de ses vêtements propres, taille sa soupe pour oc- cuper le repos du dimanche. C'est calme, c'est honnête et d'une sérénité qui fait plaisir. C'est, à notre avis, bien pré- férable à la Vendange de M. Bail, un réaliste patenté celui- là , mais dont les personnages, en général, auraient besoin de passer par le savon de M. Sicard pour être un peu plus ragoûtants, et dont les femmes, en particulier, ont plus l'air de maritornes de faubourg que de braves paysannes. M. Bail a tout naturellement les honneurs du grand salon et, avec lui, M. Salle et sa batteuse de beurre. Une bien brave femme que cette Mà connaise; malheureusement, plus on la regarde plus on s'aperçoit qu'elle n'a jamais été de chair ni d'os, c'est une automate, elle est en bois et c'est ce qui ex- plique l'inflexible rigidité de toute sa personne et la fixité légèrement hébétée de son regard ; finalement c'est une eu-