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AU xviiie SIÈCLE 343 On sait le reste. Rentré dans sa patrie, il fut l'un des principaux instigateurs de la journée du 10 août, et, nom- mé membre de la Convention, il y fit décréter l'abolition de la royauté le 21 septembre 1792. « Une grande force de pou- mons, — dit Mrae Roland, dont le mari était l'ennemi per- sonnel de Collot, — le jeu d'un farceur, l'intrigue d'un fri- pon, les écarts d'une mauvaise tête et l'effronterie de l'igno- rance, tels furent ses moyens de succès dans les clubs, par- ticulièrement aux Jacobins, qui osèrent bien parler de lui lors de la formation du ministère patriote, sous le règne de Louis XVI (1). » On peut opposer à ce tableau hostile le très-curieux por- trait qu'un ami politique de l'ancien acteur, Fréron, a écrit dans son journal VOrateur du Peuple • Collot-d'Herbois avait apporté à l'Assemblée (de la Convention) un esprit orné par la littérature. L'art de la déclamation, cette partie si impor- tante de l'éloquence, n'avait point été tout à fait étranger à ses précé- dentes études. Une physionomie un peu sauvage, une encolure forte et vigou- reuse, un organe imposant quoique un peu voilé, une diction théâtrale, des pensées tantôt énergiques, tantôt ingénieuses, une facilité d'improviser parfois très-oratoire, h talent d'intéresser le cœur et à 'échauffer le sentiment, d'attribuer avec art à des causes morales des résultats purement physi- ques, de verser dans les âmes une sorte d'onction douce et pénétrante, lui avaient souvent attiré les applaudissements à la Convention et surtout aux Jacobins. — Au reste, plus brusque et plus impétueux dans les affaires qu'adroit et insinuant, faire sauter les prisons par l'explosion de la poudre, exposer par centaines des coupables au feu du canon, étaient des idées qui ne révoltaient point son caur,naturellement généreux et tendre, mais vif et pé- nétré du besoin d'anéantir les ennemis de la liberté (2). » (1) Mémoires de Madame Roland, édition Hachette, page 224. — Collot-d'Herbois s'était cru frustré lorsque Roland avait été appelé au ministère de l'intérieur. (2) Pages 7 et 8 du Fragment pour servir à l'histoire de la Convention nationale depuis le 10 thermidor jusqu'à la dénonciation de Lecointre inclusi- vement. — Paris, le 29 fructidor an it de la République française, 15 septembre 1794.