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                            AU XVIIe SIÈCLE                            331
   Au nom de Dieu et de la Très-Sainte Trinité, Amen.
   Je, François de Mornieu, escujer, donnataire de Melchior de Mor-
nieu, aussi escujer, mon père, par acte du sixiesme may de l'année
dernière, receu par M> Delhorme l'aisné notaire royal, sçachant l'infir-
mité de l'humain, et que les choses de ce monde sont incertaines, aussy
bien que l'heure de la mort, pour la preuenir et esuiter tous procès et
diftérenz qui pourraient naistre après mon deceds pour mes biens entre
mes parens et prétendantz droitz en ma succession, ay faict mon tes-
tament solennel et ordonnance de dernière volonté comme suit :
   Premièrement, comme chrestien catholique, apostolique et romain,
j'ay faict sur moy le signe de la croix, disant : In nomine patris, filij et
spiritus sancti, et recommandé mon âme à Dieu le créateur, le priant
par l'intercession de Notre-Seigneur Jésus-Christ, son Fils, de la glo-
rieuse vierge Marie, des sainctz et sainctes du paradis, de luy vouloir
faire miséricorde, et la vouloir receuoir au rang des bienheureux, lors
qu'il luy plairra de la séparer de mon corps, la sépulture duquel j'eslit
en l'église paroissielle de l'endroit où je me trouveray lors qu'il plaira
à Dieu disposer de moy, et quand à mes frais funéraires, je m'en re-
metz à la volonté et discrétion de mon héritière cy après nommée, en
laquelle j'ay toutte confiance.


   Selon l'usage de l'époque, Mornieu ordonne de dire
pour le repos de son âme un nombre de messes qui paraî-
trait aujourd'hui extraordinaire aux personnes les plus
pieuses. Il semble que le sentiment naturel d'égalité, ou
d'envie si l'on veut, qui existe toujours à l'état latent dans
le coeur humain, devait faire trouver bien singulier, même
aux âmes les plus croyantes du peuple, ce privilège de la
fortune qui se perpétuait encore au-delà de la tombe, et
permettait de faire servir ses richesses à acheter le paradis.
On ne peut guère faire supporter l'inégalité pendant la vie
sans proclamer au moins l'égalité après la mort.
   Mornieu entre pour ces messes dans de minutieuses dis-
positions :

  ITEM, je veux et ordonne à ma dite héritière que dès le jour de mon
décès et incessamment sans aucun dellay, elle face dire pour le salut de
mon âme la quantité de mille messes basses aux églises et couventz de