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AU XVIIe SIÈCLE 329 de vouloir accepter une somme de huit cents livres, que j'ai ordonné qu'on leur donne après ma mort » Et cependant il n'y a pas de siècle où la légèreté, l'es- prit, la bonne humeur, l'art de rire des choses les plus graves, le mépris de la mort sur le pré ou sur le champ de bataille ait été poussé plus loin que le siècle des Voiture, des Sévigné, des Bussy, des Grammont, des Condé et de tant d'autres. Mais en face de la mort tranquille, réfléchie, pour ainsi dire, tout ce monde était saisi de frayeur. Il se sentait comme dominé par des puissances invisibles, for- midables. Il était sous le coup d'une sorte de terrorisme religieux, qui nulle part ne se peint mieux que dans la lettre de La Fontaine à Maucroix, du 16 février 1695 : « Hier, en revenant de l'Académie, il me prit une si grande foiblesse, que je crus véritablement mourir. O mon cher ! mourir n'est rien : mais songes-tu que je vais comparoître devant Dieu ? Tu sais comme j'ai vécu ? Avant que tu re- çoives ce billet, les portes de l'éternité seront peut-être ouvertes pour moi. » De tout ce que le xvne siècle a dit sur la fin humaine, depuis Bossuet et Bourdaloue jusqu'à La Bruyère et La Rochefoucauld, le mot le plus humain, le plus sincère dans sa modestie, le vrai cri du cœur, a été prononcé par Mad. de Sévigné : « Je hais encore moins la vie par les épines dont elle est semée que parce qu'elle conduit à la mort. » IV A toutes les époques croyantes, il a été d'usage de com- mencer son testament par une profession de foi. Régnante inperpetuum Domino nostro Jesu Christo, c'est par ces mots