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284                 PIERRE ET JEANNETTE
   Il voudrait se précipiter vers eux ; mais la prudence le
retient ; il vaut mieux attendre qu'ils soient prévenus par
l'avis qu'il a laissé. Bientôt il entend le cri de surprise que
causent à la jeune fille cette photographie d'une ressem-
blance frappante et le petit mot qui l'accompagne.
   André et sa femme, d'abord muets d'étonnement, laissent
échapper des paroles entrecoupées : « Oh ! comme il nous
a cherchés avec persévérance!            Allons! il nous aime
toujours !... C'est un bon cœur; nous avons eu tort de l'é-
carter de nous ;... qu'il vienne, nous serons heureux de le
recevoir! »
   Jeannette pleurait de bonheur. Pierre n'est pas longtemps
à les suivre. Les embrassements et les sanglots se confon-
dent pendant quelques moments. Enfin le voyageur s'écria,
en serrant convulsivement les mains d'André et de Cathe-
rine : « Dites-moi, au nom du ciel, pourquoi vous m'avez
fermé votre affection, pourquoi vous m'avez retiré une
correspondance avec celle qui remplit mon cœur et qui le
remplira toujours ! Pourquoi ce silence, ce mystère, ce dé-
part de Beauregard, cette retraite dans un canton si reculé ?
N'avez-vous plus eu confiance en ma parole ? Pensez-vous
que j'aurais pu tromper cette enfant que j'aime plus que la
vie ? Ma Jeannette, as-tu douté, toi, un moment de ma
foi ? »
   « Jamais, dit-elle, jamais, ô mon Pierre ; j'ai obéi à mes
parents en ne t'écrivant plus, mais mon âme était toujours
en communication avec la tienne, je ne doutais pas de ta
constance, et je pensais bien que tu devais être sûr de la
mienne. Pourquoi, ô mes parents bien-aimés, avez-vous
pris des résolutions si extraordinaires? Dans mon respect
pour vous, je n'ai pas osé vous arracher votre secret, mais
maintenant, devant Pierre, devant vos deux enfants qui
vous en prient, et au milieu de mon bonheur qui revient,