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ou L'ÉCOLE DES PAYSANS 65 dont je ne me doutais pas avant de savoir lire. M. Riche- mont a une belle bibliothèque, où il me permet, dans mes moments de loisir, de prendre des livres, sur le choix des- quels je le consulte. J'aime surtout les ouvrages d'histoire, de géographie, d'agriculture, d'histoire naturelle, et j'aurai du plaisir à causer avec toi de tant de choses que j'apprends par la lecture. Dans une de ses lettres, Jeannette parlait ainsi de ses propres progrès : « J'ai suivi assidûment les leçons de la digne institutrice du village, Mme Lambert; elle a été si contente de moi qu'elle m'a chargée de l'aider comme sous-maîtresse, et je dirige sous ses ordres une partie des petites élèves de la commune. « Je me plais extrêmement dans la conversation de cette femme instruite et excellente; elle me prête souvent les livres et les atlas de sa bibliothèque, et j'éprouve un grand bonheur à lire et à étudier soit près d'elle, soit chez mes parents, à qui je donne aussi toute l'aide que je puis, car je ne veux pas cesser d'être paysanne, malgré le peu d'ins- truction que j'ai acquise, et les travaux de la campagne n'ont pas moins d'attrait pour moi que ceux de l'école. » Près des trois quarts d'une année s'étaient écoulés dans cette agréable habitude de correspondance, lorsque tout à coup les lettres du village manquèrent. C'était vers le pre- mier du mois qu'arrivait ordinairement la désirée missive ; quinze jours, un mois se passent, et la poste n'apporte rien. Le deuxième mois s'écoule, même silence. Pierre était désolé; qu'allait-il devenir si cette absence de nou- velles se prolongeait? Il était évident que quelque triste événement avait em- pêché la plume de Jeannette de faire son office ordinaire. Etait-elle malade ? N'existait-elle plus ? Ou bien seraient- ce les parents de Pierre qui auraient éprouvé quelque grave 5