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AU XVIII0 SIÈCLE 27 s'indigna. Pourtant, la directrice dut faire soumission, le 11 avril suivant, de payer à la ville la somme offerte par ses concurrents, pour conserver l'exercice des spectacles. Ayant ensuite obtenu du consulat un rabais de 10,000 li vres, elle fut de nouveau en butte aux vexations de Sordo, qu'un nouvel arrêt mit en possession du théâtre. Le public prit parti pourM m e Lobreau, et les acteurs se retirèrent en masse, prétendant qu'engagés envers elle, sa retraite rési- liait leurs traités (1). Active, persévérante, celle-ci parvint, malgré le mystère dont on avait enveloppé cette manœuvre, à se procurer une expédition en règle du traité qui la dépouillait si injuste- ment, et par lequel les nouveaux entrepreneurs assuraient à L... dix-huit mille livres par année, pendant leur exploi- tation, et un pot-de-vin considérable. Munie de ces pièces, Mme Lobreau prit une chaise de poste, se rendit à Versailles, vit le duc de Villeroy qui faisait son service de capitaine des gardes, et obtint la faveur de présenter elle-même à la jeune reine un placet appuyé de pièces justificatives. Louis XVI fut instruit de l'odieuse injustice dont cette femme était victime. Déjà prévenu contre Turgot pour quelque intrigue de palais, le roi fit appeler ce ministre : — « Votre chef de bureau L..., lui dit-il, est un fripon qui abuse de votre nom pour dépouiller les gens honnêtes et vendre les places à son profit. Faites-lui restituer ce qu'il a reçu pour la direction du spectacle de Lyon : que l'ancienne directrice soit remise dans ses droits et chassez cet homme. » La réprimande était aussi sévère qu'inattendue. Turgot, ne connaissant point cette affaire, répondit qu'il s'en infor- (1) Clerjon et Morin, t. vi, p. 438.