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LES CHASSEURS DE RENNES. 404 Comme je m'arrêtai pour examiner les hôtes aux mains desquels nous allions nous livrer à l'aventure : — Ne craignez rien, dit le docteur; ce sont de braves gens. Et il continua sa marche, beaucoup plus préoccupé d'assujettir son pied et de ne pas rouler, que de l'entre- vue qui se préparait. Il paraissait être en plein pays de connaissance. Je le regardais avec admiration. En approchant des huttes, il se mit à courir vers le groupe qui nous observait et agita son chapeau en l'air. Moins pressé que lui d'arriver, je le suivais à distance. La foule restait immobile et silencieuse. Mais au moment où l'excellent docteur, arrivant à portée de la voix, leur souhaita le bonjour en faisant une magnifique révérence, un immense éclat de rire l'accueillit , et la confusion commença. Mon compagnon fut entouré et je le perdis de vue au milieu d'un tohu-bohu et d'un brouhaha indes- criptibles. On me fit un accueil moins chaleureux. Le. docteur avait tous les succès et je n'en étais nullement jaloux. Je parvins à grand'peine à le rejoindre. Il gesticulait comme un possédé pour reprendre ses lunettes qu'on lui avait enlevées et qu'on examinait avec les marques du plus profond étonnement. Sa pioche et son marteau avaient disparu de sa ceinture et pas un des boutons de son habit ne demeurait à sa place. On eût dit un yacht désemparé par un coup de mer et roulé par les lames. — Docteur! m'écriai-je, cher docteur ! vous allez vous faire dévorer. — Ne craignez rien ; ces gens-là ne sont point anthro- pophages, et le premier moment de curiosité passé, nous serons tranquilles. Surtout veillez sur votre fusil et qu'il ne fasse point de sottises ; nous serions perdus. La recommandation était inutile. Mon fusil venait de 26